FINAXY GROUP se classe aujourd’hui parmi les premiers groupes de courtage d’assurance « généralistes » en France. Il s’articule autour de trois métiers : les risques d’Entreprise IARD et Assurance de Personnes qui représentent la moitié de son activité, les risques affinitaires et les marchés de spécialités.
Avec plus de trente acquisitions réalisées sur les quinze dernières années, son évolution est singulière. Philippe GUETTA et Cyril CHAZARAIN, Président et Vice-Président du Directoire ont accepté de nous faire part de leur expérience.
Pierre-Antoine AUBURTIN : FINAXY GROUP a réalisé plus de trente opérations de croissance externe depuis sa création, que recherchez-vous dans une acquisition ?
Philippe Guetta : Les premières acquisitions nous ont permis d’acquérir une taille critique et ainsi de devenir rapidement crédibles et légitimes, et d’avoir du poids sur le marché. Puis, une fois cet objectif atteint, nous avons affiné notre stratégie visant à nous renforcer et à nous développer sur certains marchés, ainsi qu’à nous implanter dans certaines régions. Nous avons toujours souhaité développer et maintenir une relation de proximité avec nos clients.

PAA : Qu’est-ce qui emporte votre décision d’avancer dans l’étude d’une opportunité d’acquisition ?
Cyril Chazarain : Nous avons toujours été très sélectifs. Le rationnel « business » demeure le premier critère de décision, et l’aspect financier, même s’il est important, n’arrive que dans un second temps. Le relationnel avec le dirigeant est également un élément clé : nous voulons nous inscrire dans le temps avec les dirigeants, que nous souhaitons voir nous accompagner pour garantir la pérennité et le développement de l’activité. Il nous est arrivé de ne pas donner suite à certains dossiers pourtant intéressants, parce que le dirigeant ne souhaitait pas rester à nos côtés pour assurer une bonne transition et que nous estimions le risque d’érosion du portefeuille trop important.
PG : Pour chaque acquisition, nous conservons les équipes et les sites, ainsi que les dirigeants plus ou moins longtemps en fonction de leurs aspirations mais également de leur épanouissement au sein du groupe Finaxy. Certains dirigeants qui devaient partir tôt sont restés bien plus longtemps avec nous : c’est la preuve qu’ils y trouvent leur compte ! Notre enjeu, c’est la conservation du portefeuille et le développement dans le respect du positionnement du cabinet, soit dans son périmètre régional, soit sur son marché. Sur les marques, nous avons une approche pragmatique et sommes flexibles. Sauf recommandation contraire du dirigeant, nous les conservons en général dans un premier temps car elles sont souvent bien positionnées et reconnues sur leur marché et font aussi partie de l’ADN d’un cabinet; les faire disparaître au lendemain de l’acquisition casserait probablement de la valeur. Nous souhaitons toutefois renforcer la marque Finaxy Entreprise et nous l’avons déclinée par régions. Nous voulons ainsi faire bénéficier à ces marques de la force de notre groupe : pour cela, l’identification d’un rattachement à Finaxy est nécessaire à terme et les dirigeants eux-mêmes nous le demandent à un moment donné.
CC : Conserver le portefeuille est notre priorité, et nous ne cherchons pas à optimiser la rentabilité à tout prix. Mais si des pistes d’optimisation ou des synergies sont naturelles, il faut bien entendu les rechercher. Dans notre proposition de valeur, nous faisons par ailleurs bénéficier du soutien des fonctions support du groupe aux cabinets qui nous rejoignent. Il ne s’agit toutefois pas d’une centralisation ou d’une intégration totale de ces fonctions support ; les dirigeants ne doivent pas non plus s’en déresponsabiliser totalement mais plutôt s’appuyer sur le groupe pour alléger leurs contraintes quotidiennes et retrouver de la respiration commerciale.
PAA : A propos des critères de décision, lequel est le plus important ?
CC : Le marché et le positionnement du cabinet ainsi que le développement des affaires sont la priorité. Comme évoqué, l’aspect financier n’est pas le premier critère même s’il est central pour rapprocher les attentes des cédants et les nôtres.
PG : Pour prendre notre décision, il faut dans un premier temps que le marché et l’implantation entrent dans notre stratégie. Ensuite, il convient d’analyser la viabilité financière du dossier.
CC : Notre stratégie se traduit notamment par une volonté de renforcer notre empreinte géographique et notre position sur certaines « verticales ». Nous sommes ambitieux et voulons accélérer tout en demeurant rigoureux dans notre sélection des dossiers : c’est la raison pour laquelle nous avons recruté un responsable Fusions & Acquisitions qui évolue depuis plus de 20 ans dans le secteur de l’assurance et du courtage et avons bâti une approche structurée pour répondre à notre stratégie de croissance externe.
PG : …Tout en restant rigoureux et sélectifs, nous demeurons agiles et réactifs.
PAA : Avec votre recul, quels sont les écueils que vous éviteriez aujourd’hui dans votre démarche de croissance externe?
CC : A chaque acquisition, il y a toujours des choses que nous n’avons pas anticipées, en positif ou négatif. Il faut rester humble, et en même temps c’est aussi ce qui est passionnant. Aujourd’hui nous sommes plus stricts et exigeants qu’avant.
PG : Aujourd’hui, nous ne mènerions plus d’acquisition par opportunisme. Si cela ne rentre pas dans notre stratégie, nous prendrions le risque de nous perdre et de casser une image, un positionnement que nous construisons. Nous, c’est l’Entreprise, l’Affinitaire et les Spécialités. Un cabinet qui n’est pas positionné sur ces verticales, nous ne l’étudions pas.
PAA : A propos d’intégration, faut-il intégrer systématiquement tout nouveau cabinet ?
CC : Au début il n’y avait pas de réelle stratégie d’intégration. Il y a dix ans, nous avons ainsi décider de cesser pendant 18 mois de mener des opérations de croissance externe pour rationaliser le groupe et finaliser l’intégration de cabinets que nous avions acquis mais qui demeuraient très indépendants. Nous avons aujourd’hui une vision claire du degré d’intégration : l’objectif est de faire bénéficier les courtiers qui nous rejoignent de la force et du soutien du groupe, de nous assurer qu’ils adhèrent aux grands principes du groupe, sans détruire de la valeur et sans leur faire perdre leur ADN.
PG : FINAXY reste un groupe très flexible, nous recherchons le consensus. Une intégration rapide pourrait sur le papier sembler idéale mais ce serait manquer de respect à l’égard des dirigeants qui nous rejoignent et détruire de la valeur : une période d’adaptation est nécessaire avant d’envisager la suite. On implique les dirigeants dans toutes les décisions structurantes et cela se passe bien : c’est un respect mutuel. Nous souhaitons que les « petites » structures qui nous rejoignent conservent leur agilité tout en bénéficiant du poids d’un groupe plus important. Nous avons des valeurs très proches de celles de ces « petites » entités et connaissons bien leurs problématiques. Nous ne les prenons pas « de haut », et il nous est même déjà arrivé de nous appuyer sur des best practices ou sur un accord particulier négocié en local par le cabinet que nous venons d’acquérir pour les dupliquer au niveau du groupe Finaxy.
CC : Certains de nos confrères proposent une intégration beaucoup plus verticale. Nous ne sommes pas convaincus par le fait que cela ne casse pas de la valeur. Pourquoi ? Parce que nous accueillons des chefs d’entreprise qui ont été habitués à bénéficier d’une certaine autonomie. Nous n’avons pas la prétention de penser qu’il y a un seul et unique modèle à appliquer à tous les cabinets. Nous faisons converger mais cela se réalise dans le temps.
PG : Nous faisons du « sur-mesure » grâce à notre adaptabilité, notre flexibilité. Nous nous adaptons au cabinet plus que l’inverse. Cependant, nous fixons des règles, un cadre, une feuille de route commune : nous voulons faire converger, en effet. Nous souhaitons développer la marque FINAXY et travailler de la même façon à Laval ou à Monaco. Les dirigeants qui nous vendent leur cabinet et rejoignent l’aventure Finaxy sont dans les faits souvent demandeurs d’intégration, et certains sont encore chez nous dix ans après. Parce que nous avons une approche différenciante : ces entrepreneurs peuvent continuer à s’épanouir dans un modèle différent et ils savent que nous respectons l’ADN de leur cabinet et leur esprit entrepreneurial.
PAA : Selon vous, à quoi faut-il être vigilant ?
PG : Il ne faut pas céder à l’appât du gain. Il est facile de casser de la valeur. On se dit souvent qu’un petit cabinet est « facile » à intégrer. Mais un rachat n’est pas qu’un chèque : il faut délivrer par la suite, ce n’est pas si simple que cela. Ce que l’on acquiert, c’est un portefeuille et des compétences. Un rachat, c’est un changement. Or, les clients n’aiment pas forcément le changement : une opération représente un risque de perte de clientèle qui n’est pas négligeable. Ainsi, lors d’une opération de croissance externe, nous sommes très attentifs à l’accompagnement du Dirigeant et à sa volonté de continuer l’aventure à nos côtés, car il est moins facile qu’on ne le pense de prendre le relais vis-à-vis de la clientèle avec laquelle il a noué une relation forte depuis de nombreuses années. Et avant de développer, il faut penser à garder et consolider ce qui a été acquis.
CC : Certains groupes de courtage, pour acquérir des « petits » cabinets, font des offres très élevées parfois déconnectées de toute réalité économique. De ce fait, il y a une très forte pression sur ces cabinets post acquisition et on observe par la suite de la casse sociale et une perte de clientèle. Nous sommes ainsi pour notre part très attentifs à trouver un juste équilibre permettant d’assurer le développement et la pérennité de la structure et de ses salariés une fois qu’elle a rejoint notre groupe
PAA : Votre offre repose-t-elle plus sur le passé ou les perspectives ?
PG : Le Business Plan peut présenter des perspectives qui nous conduisent à revoir notre offre à la hausse. Mais nous n’achetons pas le futur : notre approche est très rationnelle.
CC : Nous proposons au cédant de bénéficier d’un complément de prix dont le calcul est basé sur le développement de son cabinet. S’il croit dans son Business Plan, il a tout intérêt à adhérer à ce mécanisme. Cet alignement d’intérêt est très vertueux et permet de partager la valeur créée.
PAA : Avez-vous des regrets dans certaines opérations ?
PG : Si nous n’avons pas réalisé une opération uniquement pour une question de prix, nous ne le regrettons pas. Notre vrai regret, c’est quand nous sommes convaincus que l’opération s’inscrit dans notre plan stratégique et qu’il y a un partage de valeurs et une belle aventure à écrire avec le cabinet avec lequel nous sommes en discussions, et que nous ne réussissons pas à convaincre le dirigeant ou à être présents au bon moment pour présenter notre projet et notre offre.